Crédits photos : Patricia Franchino – Huma Rozentalsky
Crédits photos : Patricia Franchino – Huma Rozentalsky
Mise en scène – Vincent Goethals
Avec
Vincent Ozanon
Thierry Hellin
Regard chorégraphique : Sébastien Amblard
Scénographie : Vincent Lemaire
Lumières : Philippe Catalano
Environnement sonore : Olivier Lautem
Diffusion Alexandre Vitale
Production Théâtre en Scène
Coproduction Théâtre des Martyrs de Bruxelles / Opéra-Théâtre de l’Eurométropole de Metz / Espace 110 d’Illzach / Cie Euphoric Mouvance-Bellerive
Je t’aime, moi non plus…
Jean-Marie Piemme, belge de son état, écrit sa première pièce, Neige en décembre, en 1986. Il est l’auteur d’une quarantaine de textes dont Dialogue d’un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis qui raconte la rencontre entre un portier bohème et un chien errant. L’affaire paraît banale. Elle l’est moins au regard de ce chien qui parle et qui transpire l’humanité. Tous les ingrédients d’un conte urbain sont réunis : l’accident, le chien manque de mourir en traversant une autoroute, le malheur, un homme, portier dans un hôtel et vivant dans une caravane délabrée, dont la petite fille a disparu et une belle histoire, celle de leur rencontre et de leur résilience… un univers à la Godot sur les bords d’une autoroute polluée.
Tragédie clownesque donc, aux allures d’histoire d’en rire qui, ne nous y trompons pas, raconte bien davantage. L’homme hurle, aboie et grogne face à ce chien qui ruse et louvoie. Tout est bon à critiques : la pollution, la misère, les politiques, la politique, les intellos, les assistantes sociales… la vie. C’est aussi l’histoire de deux destins : celle d’un chien canaille qui adore les coups fourrés et celle d’un triste maître qui ronchonne… une histoire de paumés qui ne s’entendent pas, tout en ne sachant plus se passer l’un de l’autre.
Vincent Goethals
Né à Seraing en 1944, licencié puis docteur en philologie romane à l’Université de Liège, Jean-Marie Piemme poursuit des études théâtrales à Paris puis écrit une thèse de doctorat sur les feuilletons télévisés, publiée sous le titre La Propagande inavouée. Menant de front un travail de chercheur sur les médias et une activité d’analyste (Le Souffleur inquiet, recueil de réflexions sur le théâtre), il est aussi dramaturge, d’abord à l’Ensemble Théâtral Mobile, qu’il fonde avec Jean Louvet, Michèle Fabien et Marc Liebens, puis au Théâtre Varia et à la Monnaie (de 1983 à 1988). Depuis, il est enseignant à l’INSAS. Ses réflexions théoriques abouties,
c’est un auteur éclairé qui écrit sa première pièce, Neige en décembre en 1987 (pour laquelle il obtient l’Eve du Théâtre en 1989). Commence alors une activité littéraire prolifique (plus d’une trentaine de pièces), toutes suivies par une mise en scène et par de nombreux prix (Eve du Théâtre, Prix Triennal en 1991 et en 2002, prix « nouveaux talents » de la SACD France, prix Herman Closson (SACD Belgique), prix RFI…).
Le théâtre de Jean-Marie Piemme est toujours inscrit dans un rapport étroit au réel – une réalité sociale surtout – qui confronte le personnage au monde et à une difficile altérité. Issu d’une génération vouée au théâtre politique, Piemme décline celui-ci dans une perspective très contemporaine, où les préoccupations sociales percutent la perte de sens, la recherche et le questionnement sur l’identité. Les thèmes oscillent entre universalité et ancrage dans le présent : la recherche identitaire et le meurtre symbolique du père (Neige en décembre), les spectres de la marchandisation et de la perte des valeurs (Commerce gourmand, Ciels et Simulacres, Il manque des chaises…). Mais Piemme se tourne aussi vers des pans de l’histoire contemporaine qu’il interroge dans 1953 et Café des Patriotes, comme dans l’écriture de parties de Rwanda 94, créé par le Groupov.
Jouant en permanence sur la variation et sur la fragmentation du ton, du rythme, de niveaux de langage, Piemme enchâsse habilement des monologues à plusieurs voix, des ellipses, des citations, des références parfois codées, au sein de la trame narrative, avec une légèreté à contre-pied du propos parfois sombre.
A travers ses questionnements sur l’identité et le monde contemporain, Piemme propose surtout un théâtre où le désir et les pulsions sont le moteur des personnages confrontés à l’orthodoxie morale. Le corps vivant prend alors sa revanche, se libère et s’exprime à travers l’énergie créatrice du comédien. Car c’est avant tout un théâtre totalement scénique que celui de Piemme, où le texte ne se déploie pleinement qu’à travers son incarnation dans des corps et des voix vivantes…
… j’ai mal, moi aussi.
Férocité du texte pour ne pas laisser indifférent et pousser à l’introspection. Un écrit aux allures de critiques sociales débité par des personnages au langage coruscant, grandes gueules aux logorrhées métaphysiques, gorgées de bon sens populaire. Aussi, car l’essentiel de la relation réside dans leurs joutes verbales, j’ai choisi de ne pas encombrer le plateau, un espace épuré, une bande étroite de terrain vague au bord d’une autoroute bruyante. Un espace indéfini coincé entre la balustrade métallique et une palissade décatie où s’affiche ironiquement une publicité pour pompe à essence, un improbable chien à 5 pattes, vestige d’une célèbre marque. Une porte surélevée s’ouvrant sur un semblant d’intérieur de caravane recelant ce qu’il reste d’une vie en déroute, en suspension, une itinérance à l’arrêt avec juste le nécessaire : un fauteuil fatigué, une bassine pour la toilette, un butagaz pour la pitance, un parasol et des ballons de baudruche pour les beaux jours, quand ils viendront…
Pas d’artifice ni de fausse pudeur, juste le texte et rien que le texte. Il n’en faut pas plus. Pour enfiler ces costumes-là qui ne sont pas n’importe lesquels, nous mettrons face à face sur scène deux artistes équilibristes et funambules, Vincent Ozanon, le français un peu suisse et Thierry Hellin, le belge bien belge. Deux fortes gueules, tous deux maladivement amoureux des mots, de ceux-là qui sont gourmands et gouleyants ! Un bon gros cabot, véritable Mastiff qui s’amuse de ses bajoues baveuses et de ses oreilles pendantes ; et un grand escogriffe, maigre et desséché qui se drape de sa dignité pour masquer maladroitement ses blessures. Les deux acteurs tiennent-là un beau gros morceau d’os et ne doutons pas qu’ils s’amuseront à nous mordiller voire à nous mordre, là où ça fait mal.
La satire de notre société par le théâtre est devenue si banale qu’on arrive à ne plus l’entendre parfaitement. Le plus effrayant n’est pas de se faire mordre par un texte qui nous égratigne mais de s’habituer à l’entendre. Je choisis de le porter à la scène parce que j’ai le sentiment que ce texte permet de se reconnecter avec humour et intensité à la charge critique de la parole sur une scène.
S’il est une nécessité et un sens que je vois aujourd’hui à la représentation théâtrale, ils passent par cette impérative exigence de mettre le théâtre en phase avec la réalité du monde, dût-elle être cruelle et intolérable.
Vincent Goethals
Crédits photos : Patricia Franchino – Zvonock
Durée du spectacle :
Age :
Espace Scénique minimum :
Fiche technique détaillée sur demande à
Création du 26 novembre au 8 décembre 2024 au Théâtre des Martyrs / Bruxelles
Les 27 et 28 février 2025 à l’Opéra-Théâtre de l’Eurométropole de Metz
Saison 2025/2026 Espace 110 d’IIIzach et tournée en France
Diffusion spectacle
Alexandre Vitale
06 52 65 10 32
alexandre.vitale.diff(at)gmail.com